Le libéralisme, avant et après.




Le lac marin . [ Vieux Boucau ]

La Hongrie hier et aujourd’hui, par Auspitz


En République Populaire, le Parti ne demandait qu’une chose au camarade-citoyen : qu’il se rende chaque jour sur son lieu de travail. Ayant accompli ce devoir, l’Etat-Parti le prenait en charge jusqu’à la fin de ses jours, par le versement d’une somme mensuelle. « À chacun selon ses besoins ».

Dans ces pays de l’ancienne sphère communiste, il n’y avait pas de chômage : tout le monde était affecté quelque part, on lui demandait de s’y rendre, et au moins on savait où il se trouvait ; il n’y avait pas de chômage, ni d’allocation chômage : tout appartenait à l’Etat. Il importait peu de savoir d’où venait l’argent, d’une entreprise, d’une administration, ou d’une caisse d’allocation : comme de toute façon, il n’y avait pas de comptabilité, ça n’avait aucune importance. Tout le monde était affecté quelque part, et il y avait parfois 4 personnes pour le même poste de travail. Une chose était sûre : il n’y avait pas de chômage au sens où nous l’entendons.

Personne n’avait de raison de traîner dans la rue, puisqu’il était « occupé » sur son lieu de travail. Le brave clochard parisien n’existait pas à Budapest ; on ne le rencontrait que dans des films, jamais dans la rue ; il aurait été considéré comme un être antisocial, devant être soigné en hôpital psychiatrique, ou en camp d’internement. J’en ai pourtant croisé dans les rues, au début des années 70 : des personnalités détruites par la répression de la révolution de 1956.

Le sans-logis, en hongrois hajléktalan, n’est vraiment apparu dans le paysage qu’avec le changement de régime et le retour du capitalisme ; il est même considéré, dans certains milieux, comme une des caractéristiques du capitalisme, et le signe de son déclin.

Les gouvernements n’ont pas su de quelle façon traiter le problème, et maintenant, les digues sont rompues ; on trouve les clochards dans tous les parcs et jardins publics, dans toutes les stations de métro – surtout les plus importantes : celles qui ont une correspondance avec une grande gare, comme la gare de l’Est, (keleti pàlyaudvar) ou la gare du Midi,(déli pàlyaudvar).

On les retrouve dans les passages souterrains qui servent à traverser les grandes avenues, et où souvent, il y a aussi une station de métro, ils sont étendus sur des vieux matelas, des cartons, parfois, il faut presque les enjamber. On estime qu’il y a entre 50 et 60 000 personnes dans cette situation mais leur nombre ne va pas aller en diminuant, puisqu’un million de foyers se trouvent en retard avec des dettes de plus de 6 mois, soit ¼ des ménages. Juste avant la rue, certains habitent encore chez des amis ou bien dans des locaux qui ne sont pas des logements, tout ça dans un contexte de grande précarité.

Le phénomène est apparu dès la chute du communisme : des pans entiers de l’industrie ont été fermés, et les salariés se sont retrouvés dehors, sans aucun droit, puisqu’il n’existait aucun couverture sociale du chômage. Dans certains cas, les activités ont été rachetées par des grands groupes comme Danone ou Lafarge, et les usines immédiatement fermées pour éliminer un concurrent.

Cette précarité est le résultat d’un effet de ciseaux entre des revenus qui diminuent, blocage des salaires depuis 2 ans, suppression de toutes les primes du genre 13ème mois, diminution des retraites, et l’augmentation du coût d’entretien du logement, essentiellement les charges. Incapables de faire face, ils sont chassés de chez eux, et se retrouvent à la rue, du fait de la disparition du lien familial et social.

Soumises à une angoisse extrême, ces personnes se réfugient alors dans l’alcoolisme et se retrouvent en peu de temps irrécupérables pour la société. Il existe des centres d’accueil et de soins, surtout pour les malades, mais aucune réhabilitation n’est constatée ; en tout cas, les responsables de ces centres considèrent comme un point positif de pouvoir déjà approcher ces personnes et de rendre compte de la situation.

Il est bien évident qu’au-delà de cette souffrance humaine, une économie ne peut pas fonctionner dans de telles conditions, sans parler de l’image que l’on offre aux touristes du monde entier qui viennent visiter une des belles capitales de l’Europe.

Source : ici

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