L'été en pente douce



Rue de l'Engelbreit . [ Strasbourg ]



Pendant que notre petit président concocte des sondages à sa gloire, le monde se découvre de plus en plus en crise. Mais jusqu'où ira-t-on?








La bombe à retardement du chômage fait tic-tac, discrètement.
Quelqu’un doit pourtant sonner l’alarme dans cette longue crise.
A part les émeutes à Athènes et des tensions en région Baltique, nous ne voyons pas trace de contestation politique dure, alors que la crise ronge la légitimité des élites gouvernantes en Amérique du Nord, en Europe et au Japon. Ce n’est peut-être qu’une question de temps.

Par Ambrose Evans-Pritchard
Publié le 04 Jul 2009 à 8:45PM BST

Une de mes expériences bizarres, alors que je couvrais les Etats-Unis au début des années 1990, fut de rendre visite aux milices qui prenaient de l’ampleur au Texas, dans l’Idaho et l’Ohio, suite à la récession. Il s’agissait principalement de cols bleus, (précoces victimes de « l’arbitrage de main- d’œuvre » mondial) suffisamment en colère envers Washington pour passer des week-ends à s’abrutir avec des M16.
La plupart soutenait le candidat protestataire Ross Perot, qui obtint 19% à la Présidentielle de 1992 en proposant d’arrêter le commerce avec le Mexique.
Ce début de contestation se dissipa quand la reprise créa des emplois, même si un groupe marginal fit sauter le bâtiment fédéral d’Oklahoma City en 1995. Malheureusement, il n’y aura pas aujourd’hui de semblable création d’emplois. L’utilisation des capacités de production a chuté à des niveaux historiquement bas (68% aux USA, 71% dans la zone Euro). Une purge profonde est pourtant à venir.

Le plus choquant la semaine dernière, n’est pas seulement que les USA ont perdu 467.000 emplois en Mai, mais aussi que le temps de travail a chuté de 6,9% par rapport à l’an dernier, tombant à 33 heures par semaine. « A aucun moment des récessions de 1990 ou 2001, nous n’avons été aussi près de voir une situation de l’emploi si explosive, » a déclaré David Rosenberg de Gluskin Sheff & Associés. «Nous avons perdu le chiffre record de 9 millions d’emplois à temps plein durant ce cycle. »
L’évolution des salaires est tombée à un rythme annuel de 1,6% durant les trois derniers mois. La déflation salariale s’installe, comme au Japon. De façon intéressante, l’Organisation Internationale du travail est assez inquiète pour pousser à un pacte international, craignant que certains pays n’engagent une spirale ruineuse en s’attaquant aux salaires, essayant d’obtenir un avantage dans le jeu mondial.
Aux USA, certaines baisses de salaires sont déguisées. En Californie, plus de 238.000 fonctionnaires ont travaillé deux jours de moins par mois depuis février.
Cela est arrivé avec des variantes dans 22 Etats.
Le « Centre d’étude du marché du travail » (CLMS) à Boston a déclaré que le chômage est maintenant de 18,2%, en utilisant l’ancienne méthode de comptage. La raison pour laquelle cela ne « fait » pas 1930 est que nous avons tendance à comprimer la chronologie de la Grande Dépression. Les gens mettent du temps à épuiser leurs économies et sombrer dans le dénuement. Peut-être que notre matelas d’épargne plus important aujourd’hui empêchera d’autres « Raisins de la Colère », mais 2O millions de propriétaires américains sont déjà déficitaires (données : zillow.com data). Les expulsions se produisent à un rythme terrifiant.
Quelques 342.000 maisons ont été saisies en Avril, jetant une petite armée d’enfants dans le réseau des refuges de charité. Cela est à comparer aux 273.000 maisons perdues pour toute l’année 1932. Des Shérifs dans le Michigan et l’Illinois refusent discrètement de jeter des familles à la rue, comme l’ont fait des policiers catholiques lors de la Grande Dépression.
L’Europe a environ un an de retard, mais nous rattrape vite. Le chômage a atteint 18,7% en Espagne (37% pour les jeunes), et 16,3% en Lettonie. L’Allemagne a retardé l’effet falaise en payant les entreprises pour garder les travailleurs via des « Kurzarbeit ». Les « Sages » Allemands craignent que le nombre de chômeurs bondisse de 3,7 millions à 5,1 millions à la fin de l’an prochain. L’OCDE s’attend à ce que le chômage atteigne 57 millions dans les pays riches à la fin de l’an prochain.
Voilà l’effet mortel du décalage. Ce qui est si troublant est que ces gouvernements n’ont même pas commencé le resserrement des dépenses qui doit venir pour empêcher leurs pays de plonger dans le piège de la dette.
Le Président français Nicolas Sarkozy, avec un bon flair pour les humeurs populaires, a dit : « Nous devons tout revoir. Nous ne pouvons garder un système de rentiers et de dumping social dans une situation de globalisation. Ou nous avons la justice, ou nous aurons la violence. C’est une chimère de penser que cette crise est juste une note de bas de page et que nous pouvons continuer comme avant. »
Le message n’a pas atteint Wall Street ou la City. Si les banquiers savent ce qui est bon pour eux, ils prendront un salaire de professeur pour quelques années jusqu’à ce que la tempête soit passée. S’ils continuent avec les bonus qui sont sur la table, alors même que les contribuables payent pour les erreurs de leur caste, ils peuvent s’attendre à un féroce retour de bâton.
Nous avons la chance que les USA ont un nouveau président qui a un grand capital de sympathie, et un Congrès tout neuf. Les autres pays clopinent avec des gouvernements moribonds : coalition Gauche-Droite paralysée en Allemagne, restes consumés du LDP au Japon, et marche de la mort du Labour’s au Royaume-Uni. Certains prennent leurs précautions : Silvio Berlusconi essaye d’emasculer le parlement Italien (avec de faibles protestations) pendant que le Kremlin a activé les unités « anti-crises » pour étouffer toute contestation dans l’œuf.
Nous sommes dans la Phase II du Grand Scénario. Il est peut-être temps de remiser nos textes de Keynes, Friedman, et Fisher, si utiles en Phase I, et de commencer à étudier ce qui arriva à la société quand le chômage global dérailla en 1932.


source : http://www.telegraph.co.uk/finance/comment/ambroseevans_pritchard/5742937/The-unemployment-timebomb-is-quietly-ticking.html


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