Les phares de la pensée antifacsiste

Rue du Port du Rhin . [ Strasbourg ]









Voilà que les élections présidentielles sont passées. Quelle misère. Je suppose que le paysage politique va se recomposer comme disent les spécialistes. La grosse surprise du scrutin est l'élection de Hollande grâce en partie aux voix du Front National, si l'on prend compte des votes blancs et des électeurs frontistes qui ont voté Hollande . François Hollande  est élu président de la république avec moins de 50% des votants. Ce que je tenais à souligner, dans ma vision des choses, c'est que le Front National a été un recours pour dire « merde » à la « bonne pensée ». Jugement qui me vaut un débat sur le site de la délation « libertaire » alsacienne. Mais regardons les choses en face. Quant on regarde quelques résultats, on est frappé par le comportement des électeurs, c'était « merde » à Hollande au premier tour et « merde » à Sarkozy au second. Pour illustrer mon propos, voici un petit résultat électoral  :

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Grenay : Marine Le Pen arrivait en tête au premier tour, François Hollande fait 71,55 % au second
dimanche 06.05.2012, 21:14 - La Voix du Nord
| Artois |
A Grenay, commune historiquement à l'extrême gauche, Marine Le Pen était arrivée en tête au premier tour de cette présidentielle, le 22 avril.

Elle avait récolté 34,70 % des suffrages exprimés, devant François Hollande qui faisait 29,25 %.
Le maire de la commune, Christian Champiré, avait analysé le vote FN comme un vote protestataire et avait appelé dans le bulletin municipal à "en finir avec Nicolas Sarkozy, ses amis du Fouquet's et de l'hôtel Crillon et je sais, électeurs grenaysiens que nous le ferons très massivement en utilisant le seul bulletin de vote possible, celui de François Hollande !". Son appel a été entendu par la population grenaysienne. François Hollande arrive finalement en tête au second tour avec 71,55 % des voix, faisant dire au maire que "Grenay est toujours une ville de gauche".
Plus de détails dans votre édition de Lens - Liévin, demain.
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Ce type de résultat pose quelques questions, il tranche avec le cliché  simpliste que certains se font de l'électorat frontiste et des raisons du vote frontiste. Le vote frontiste est encore l'objet de raccourcis  faciles qui n'apportent pas énormément au débat. Les grands intellectuels de l'extrême gauche libérale du site de la délation « libertaire « alsacienne nous livrent leurs profonde analyse sur la question en reprenant un petit article d'un phare de la pensée antifasciste qui glose sur la souffrance des électeurs du Front National :
« Il est temps de dire franchement aux électeurs lepénistes qu’on ne va rien faire pour calmer leur souffrance, bien au contraire. Il est temps de faire vivre enfin les principes de notre constitution, de combattre enfin les discriminations, et de faire par conséquent cette promesse aux électeurs lepénistes : si c’est l’égalité qui vous fait souffrir, vos tourments ne font que commencer ! »
P.-S.
Ce texte est paru initialement sur Mediapart, le samedi 28 avril 2012.



J'ai répondu à ce commentaire, et comme d'habitude le site de la délation « libertaire » n' a pas cru bon de publier mon commentaire pour je ne sais quelles obscures raisons. Ce commentaire le voici :

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lenoyer dit :
Votre commentaire est en attente de modération
02/05/2012 à 17 h 17 min
Pour le monsieur de Mediapart le score du Front National chez les zouvriers bénéficie d’un effet d’optique :  » les scores impressionnants du FN chez les ouvriers et les chômeurs n’étant qu’un effet d’optique trompeur lié à l’abstention : les ouvriers et les chômeurs ne votent pas plus que la moyenne pour le FN, mais ils votent moins que la moyenne pour les autres candidats, et sont sur-représentés chez les abstentionnistes et les non-inscrits). »

Les antifascistes ne sont pas tous des abrutis, la preuve, ils réussissent à trouver que les ouvriers et autres chômeurs votent Marine Le Pen en grand nombre. Est-ce un bien ou un mal, là n’est pas la question, c’est un fait : « Chose impensable il y a encore quelques années, le Front National arrive en tête dans une trentaine de villes du bassin minier:
Hénin-Beaumont, Montigny-en-Gohelle, Drocourt, Rouvroy, Noyelles-Godault, Dourges, Harnes, Annay, Fouquières-les-Lens, Billy-Montigny, Courcelles-les-Lens, Evin-Malmaison, Mericourt, Bois-Bernard, Vendin-le-viel, Pont-à-Vendin, Estevelles, Bénifontaine, Meurchin, Wingles, Douvrin, Haisnes, Auchy-les-Mines, Vermelles, Mazingarbe, Grenay, Hersin-Coupigny…«[...]» Et là où le fascisme promet que “tout va changer pour que rien ne change”, tout en amenant la barbarie, il nous faut avoir véritable un projet de société, qui ne laisse personne sur le bord de la route.»
C’est une bonne conclusion, elle change du style  » électeur du FN , tu vas souffrir ! » .
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La réponse sur le site de la délation « libertaire» alsacienne a été la suivante : « Les toutes dernières phrases du texte signé P.S. sont très bien senties. La dernière est carrément géniale. Voilà qui est dit.» Je pense que certaines personnes qui publient sur le site de la délation « libertaire » n'ont pas vraiment saisi ce qui est en train de se passer actuellement. Et je ne suis pas le seul à penser de la sorte, je viens de lire un article de monsieur Lordon sur le scrutin présidentiel, et j'avoue être d'accord avec son analyse du vote frontiste. Dans l'extrait suivant, il pointe du doigt des signes de fatigue intellectuelle dans la gauche de la gauche :

« […] à propos des électeurs FN qu’il lui incombe de reconquérir, même la gauche (la vraie gauche) commence à donner des signes de fatigue intellectuelle. En témoignent les refus exaspérés d’entendre seulement dire « la France qui souffre ». Assez de la souffrance sociale ! et retour aux explications simples et vraies : ce sont des salauds de racistes. Dans une parfaite symétrie formelle avec la droite qui, en matière de délinquance, refuse les « excuses sociologiques », d’ailleurs tristement suivie par la (fausse) gauche depuis un sombre colloque de Villepinte en 1997 (à chaque terme socialiste ses abandons…), voilà qu’une partie de la (vraie) gauche, en matière de vote FN, ne veut plus de « l’alibi » de la souffrance sociale. Cette commune erreur, qui consiste à ne pas faire la différence entre deux opérations intellectuelles aussi hétérogènes que expliquer et justifier (et par suite « excuser »), finit inévitablement en le même catastrophique lieu de l’imputation d’essence, seul énoncé demeurant disponible quand on s’est privé de toute analyse par les causes. Les délinquants seront alors la simple figure du mal, n’appelant par conséquent d’autre réponse que la répression. Quant aux électeurs de l’extrême droite, ils sont donc « des salauds », appelant… quoi d’ailleurs ? La colonie lunaire ? Au déplaisir général sans doute, il faudra pourtant faire avec eux. »





Après cela, nous avons des gens de la vraie gauche ayant lu l'article de Frédéric Lordon qui justifie un jugement musclé de l'électeur du Front National: « Désigner l’électeur du Front National comme gros con, beauf ou facho, c’est lui signifier clairement — au cas pas si improbable où il ne le saurait pas déjà — qu’il est un délinquant de l’idéal humaniste républicain.»
 Vous avez bien lu, l'électeur frontiste est un « délinquant ». Comme ce terme est bien choisi, et comme il illustre à merveille l'expression bien connue de « police de la pensée ».  Cette gauche pourrait tirer profit de la  de Jean-Claude Michéa quand celui-ci évoque une sorte règle qui semble émané de sa lecture d'Orwell : « quand l’extrême-droite progresse chez les gens ordinaires (classes moyennes incluses) , c’est d’abord sur elle-meme que la gauche devrait s’interroger. »

Pour conclure, il ne s'agit pas pour moi de dire que les solutions du Front National sont les bonnes, loin de là. Mon propos est plutôt est de souligner combien certains réflexes « intellectuels »  de la gauche de la gauche sont franchement éprouvants pour l'intelligence du commun des mortels.